BLOG | L’histoire du e-commerce : de la boutique en ligne à la DXP personnalisée

10/10/2025

Dans notre série d’articles sur les DXP, nous avons vu :

Je dois avouer qu’il m’a été difficile d’entreprendre cette nouvelle partie de la DXP : le sujet de l’e-commerce est vaste. Je ne savais pas trop par où commencer, tant il est facile de se perdre dans toutes les notions. Donc retour aux sources avec la réutilisation du concept pédagogique qu’on nous apprend tous à la maternelle : la frise chronologique. Accrochez-vous, c’est parti pour une frise chronologique des modèles de commerce numérique !

1991-1995 : La naissance des premiers sites vitrine

Avec l’ouverture du Web au grand public en 1991 et la création du tout premier site Internet par le CERN, débute l’ère des sites vitrine. Ces premiers sites étaient principalement statiques, destinés à présenter une entreprise, ses services ou ses produits sans possibilité d'interaction ni de transaction en ligne. Ils jouaient un rôle similaire à celui d'une brochure numérique, souvent avec un design très rudimentaire.

Le site vitrine de Klee Group de 2001, je n’ai pas réussi à trouver celui d’avant.

À partir du milieu des années 90, certaines entreprises pionnières ont commencé à exploiter le potentiel du web comme un média à part entière. Elles ne se contentaient plus de lister des informations : elles ont initié une stratégie de création de contenu pour engager leurs visiteurs. Cela a marqué les débuts du "brand content", c’est-à-dire la production de contenus éditoriaux, éducatifs ou ludiques autour de leurs produits, dans le but de raconter une histoire, construire une image de marque et fidéliser leurs premiers internautes.

Ce tournant a posé les fondations du marketing digital, en préparant le terrain à des pratiques plus avancées comme le référencement naturel (SEO) ou l’inbound marketing.

1995-1997 : L’apparition du commerce en ligne B2C

Le modèle B2C (Business to Consumer) connaît ses débuts avec des pionniers comme Amazon (1995) ou eBay (1995) et marque une rupture en permettant des achats directement en ligne, sans intermédiaire physique. Une alternative électronique à nos regrettés catalogues de La Redoute et des Trois Suisses.

L’adoption du commerce en ligne par les entreprises suit généralement trois grandes étapes d’évolution :

Le modèle hybride : les ventes pilotées par une équipe commerciale et assistée par un canal en ligne

Dans un premier temps, le canal digital sert principalement à soutenir les actions des commerciaux. L'un des leviers les plus simples pour progresser est la mise en place d’un portail client : informations personnalisées par compte client, transparence dans la relation et assistance commerciale.

On reste centré sur l’humain : le commercial est l’interlocuteur principal.

Le libre-service assisté : les ventes en ligne appuyées par une équipe commerciale

Le client peut initier et gérer une partie du parcours d’achat lui-même en toute autonomie, tout en étant accompagné si besoin. Les équipes commerciales interviennent en soutien pour apporter une expertise supplémentaire ou conclure des ventes plus efficacement. Ce modèle redéfinit le rôle du commercial : le vendeur agit comme conseiller stratégique, en co-construction avec le client pour créer de la valeur.

Le modèle e-commerce complet : les ventes entièrement automatisées

À ce stade, l'interaction humaine est minimale : l'ensemble du processus, de la commande au paiement, est automatisé grâce à l’intégration d’outils comme les PIM (Product Information Management), ERP, CRM, etc. Les clients gèrent seuls tout le parcours d’achat et bénéficient de recommandations personnalisées. Ce modèle vise l’efficacité maximale tout en améliorant l’expérience utilisateur.

Cette évolution vers une automatisation plus poussée soulève un paradoxe : la réduction des frictions humaines dans le parcours d’achat exige une attention accrue à la qualité et à la dimension émotionnelle de l’expérience client. Le « moins d’humain » doit être compensé par une expérience plus engageante, fluide et satisfaisante. Un enjeu particulièrement sensible pour les générations qui ont connu un monde sans Internet. Car pour les générations X et Y, aujourd’hui en position de décision, les expériences fluides, autonomes et sans friction, souvent sans interaction humaine, sont désormais la norme.

1998-2000 : L’essor du e-commerce entre entreprises (B2B)

Les portails B2B (Business to Business) sont nés de la nécessité, pour les entreprises, de fluidifier et de digitaliser les interactions avec leurs clients professionnels. Initialement conçus comme des espaces en ligne dédiés à la gestion des commandes, ces portails ont connu une évolution rapide pour devenir des plateformes stratégiques au cœur des relations commerciales. Voici une rapide rétrospective de l’évolution de ces portails

À leur origine, les portails B2B servaient principalement à centraliser les données commerciales : catalogue produits, conditions tarifaires, historique de commandes, factures, documents contractuels, etc. Avec la montée en puissance du digital et des attentes de rapidité, les portails B2B ont intégré des fonctionnalités de self-service, inspirées du e-commerce B2C. Les clients professionnels ont progressivement adopté ces outils pour gagner en autonomie, réduire leur dépendance aux équipes commerciales et simplifier leur quotidien.

Aujourd’hui, les portails B2B évoluent vers des expériences clients enrichies, proches des standards du B2C : 

  • Interfaces modernes et intuitives,
  • navigation personnalisée selon les secteurs, métiers ou profils d’achat,
  • intégration de recommandations intelligentes (produits complémentaires, suggestions dynamiques),

Ils ne sont plus de simples points de commande, mais des hubs digitaux au service de la relation client, de la fidélisation et de la croissance commerciale.

Les enjeux d’un portail B2B sont dans :

  • L’automatisation des processus métier : commandes, devis, facturation, suivi logistique… Ces tâches autrefois manuelles sont désormais centralisées et automatisées, réduisant les erreurs et les coûts de traitement.
  • L’intégration avec les systèmes internes : les portails s’interfacent avec les ERP, CRM, systèmes de gestion de stock ou outils comptables pour fluidifier les échanges et garantir la cohérence des données.
  • Le gain de temps pour les clients et partenaires : grâce à un accès 24/7 à un espace sécurisé et personnalisé, les interlocuteurs professionnels peuvent accéder à leurs documents, passer commande ou poser une question sans attendre l’ouverture des bureaux.
  • L’accès à la donnée et pilotage : ces plateformes permettent de collecter des données d’usage, d’achat ou de comportement qui alimentent des tableaux de bord pour une prise de décision plus stratégique.
  • Le déploiement à l’international : un portail bien conçu peut s’adapter à différents marchés, langues et devises, facilitant l’expansion commerciale à l’étranger.
  • L’image de marque et professionnalisation : proposer une interface claire, moderne et performante valorise l’entreprise aux yeux de ses clients et partenaires, et démontre sa maturité digitale.

Avant de passer à la suite, voici un checkpoint précisant les principales différences entre le site vitrine, le portail B2C et le portail B2B

Caractéristiques

Site Vitrine

Portail B2C

Portail B2B

Objectif principal

Présenter l’entreprise et ses services

Vendre à des particuliers

Gérer les échanges et transactions entre entreprises

Public cible

Grand public, partenaires, presse

Consommateurs individuels

Clients professionnels, partenaires, distributeurs

Fonctionnalités principales

Pages de contenu, formulaire de contact

Catalogue produits, panier, paiement en ligne

Espace client, devis, commandes, tarifs personnalisés

Gestion des utilisateurs

Non connecté ou simple formulaire

Comptes clients classiques

Accès sécurisé avec rôles et droits complexes

Personnalisation

Faible

Modérée

Forte : tarifs, conditions, contenu selon l’entreprise

Complexité technique

Faible à moyenne

Moyenne

Élevée (intégrations ERP, CRM, SSO, workflows métier)

Cycle d’achat

Aucun ou très court

Court (achat immédiat ou spontané)

Long (négociations, validation interne, commande)

2000-2003 : L’arrivée des plateformes entre particuliers (C2C)


Le début des années 2000 marque l’émergence des premières plateformes numériques facilitant les échanges directs entre particuliers, appelées plateformes C2C (Consumer to Consumer). Ces services permettent à des consommateurs de vendre, acheter ou échanger des biens et services sans passer par un intermédiaire professionnel. Si je donne l’exemple du site Leboncoin.fr (lancé en 2006), tout le monde comprend. Dans les faits, cela a radicalement transformé les usages de consommation en favorisant l'économie collaborative et la seconde main. En particulier en ce moment où la crise écologique nous fait prendre conscience de l’importance de la réutilisation / réparation.

Nous pouvons citer un autre exemple emblématique : Airbnb, fondé en 2008. On pourrait également se poser la question : « est-on encore dans du C2C dans ce cas de figure ? ».

Les fonctionnalités clés d’un portail C2C sont :

  • La présence de marketplaces facilitant la publication d’annonces, la recherche, le filtrage, et la mise en relation entre les utilisateurs.
  • Des systèmes de paiement sécurisés qui fiabilisent les transactions et réduisent les risques de fraude.
  • Un système de notation (qui peut nous faire frôler le monde dystopique d’un Black Mirror).

Une présence forte sur les mobiles qui favorise un usage fluide et immédiat

2003-2005 : Les consommateurs proposent des produits ou services aux entreprises (C2B)

Au milieu des années 2000, une nouvelle dynamique inverse les rôles traditionnels entre entreprises et consommateurs : le modèle C2B (Consumer to Business). Ce ne sont plus uniquement les entreprises qui offrent des produits ou services aux particuliers, mais les consommateurs eux-mêmes qui proposent de la valeur aux entreprises.

Cette tendance croissante reflète la valorisation des compétences et de la présence numérique des individus. Des exemples concrets permettent de mieux comprendre le concept :

  • Influenceurs sponsorisés : des particuliers dotés d’une audience sur les réseaux sociaux proposent leur visibilité aux marques, en échange de rémunération ou de produits. Alors attention, distinguons bien « critique » de « influenceur ». Autant j’apprécie les critiques, autant je fuis les influenceurs.
  • Testeurs rémunérés : des consommateurs sont recrutés pour essayer des produits, donner leur avis ou participer à des études de marché.
  • Freelances sur plateformes : des professionnels indépendants (designers, développeurs, rédacteurs, etc.) vendent leurs services directement à des entreprises via des plateformes de mise en relation.

La montée du travail indépendant, la digitalisation du travail et la mondialisation des services sont des causes directes de la création de ces plateformes. Le modèle C2B inaugure une ère où les consommateurs deviennent acteurs de l’économie numérique non seulement par leurs achats, mais aussi en tant que producteurs de valeur pour les marques.

2010-2014 :  Les marques vendent directement sans intermédiaire (D2C)

Le modèle D2C désigne une stratégie commerciale où les marques vendent directement leurs produits aux consommateurs, sans passer par des intermédiaires (distributeurs, détaillants, marketplaces tierces). Il s’est imposé comme une révolution dans le commerce de détail, favorisée par la digitalisation et les attentes de plus en plus fortes des consommateurs en matière de personnalisation et de transparence.

Même s’il existe quelques exemples avant 2010 comme Nike, l’essor massif se produit entre 2010 et 2020. La force du modèle est le contrôle total sur l’image de marque, la data client et les marges. La relation client est directe ce qui permet une forte personnalisation. La marque parvient ainsi à fidéliser tout en se conservant une bonne rentabilité.

Ce sujet peut faire penser aux plateformes participatives où le créateur s’adresse directement au consommateur (très connu dans le monde du jeu par exemple).  Mais je ne m’y attarderai pas ici, l’article étant déjà suffisamment dense.

Voici un nouveau checkpoint des principales différences entre le portail B2C et le portail B2B et un site D2C

Modèle

D2C (Direct-to-Consumer)

B2C (Business-to-Consumer)

B2B (Business-to-Business)

Définition

Une marque vend directement à ses clients finaux

Un distributeur vend à des particuliers

Une entreprise vend à d’autres entreprises

Intermédiaires

Aucun : vente directe, sans revendeurs

Souvent via marketplace ou distributeur

Négociation et vente entre professionnels

Relation client

Personnalisée, centrée sur la marque

Standardisée, centrée sur la conversion

Contractuelle, sur le long terme

Positionnement marketing

Fort storytelling, maîtrise de l’image

Volume, prix, rapidité d’achat

Services associés, spécificités techniques, conditions sur mesure

Il est évident qu’une marque peut jouer sur tous les tableaux à la fois. Prenons l’exemple de Salomon (ah, comme je regrette leurs rollers en ligne !):

  • Salomon vend à Intersport → modèle B2B
  • Salomon sur Zalando → modèle B2C
  • Salomon sur salomon.com → modèle D2C

Sans parler, bien sûr, des boutiques physiques.

2015-2017 :  Une entreprise fournit un produit à un client final via un partenaire (B2B2C)

Le B2B2C est un modèle hybride qui combine le B2B et le B2C. Il permet à une entreprise A de vendre à une entreprise B, qui elle-même sert ou revend directement au consommateur final C, le tout dans un parcours intégré, souvent digitalisé.

L’avantage de ce modèle, c’est qu’il permet à la marque de conserver une relation directe ou du moins une visibilité sur le client final, tout en s’appuyant sur un intermédiaire commercial.
Prenons un exemple concret : Bosch vend à Darty, qui vend ensuite au client final, mais Bosch garde la main sur le service après-vente.

Lors de ma visite au salon TechForRetail en 2024, de nombreuses conférences ont porté sur ce sujet délicat à résoudre. Les marques qui sont uniquement dans une approche avec intermédiaire perdent malheureusement la connaissance de leurs clients finaux. D’un autre côté, il est difficile de gérer la cohérence entre la publicité de la marque et celle du retailer. Il n’est donc pas si simple de garder une certaine maîtrise sur l’expérience client finale.

2018-2019 : Personnalisation extrême, centrée sur les besoins individuels (B4Me)

Cette dernière étape constitue plus une philosophie qui peut être appliqué sur les portails décrits ci-dessus. Il s’agit d’être centrée sur l’utilisateur final. 
Les entreprises adaptent désormais leur offre, leur communication et leurs services en fonction des besoins, préférences, comportements et contextes propres à chaque consommateur. L’entreprise est centrée sur moi, mes besoins, mes attentes. On me parle directement. Je me sens reconnu, presque aimé. Dans cette dynamique, je vous invite à lire mon article sur le marketing tribal.

Nous sommes ici au cœur des sujets de personnalisation, de recommandation puis d’hyperpersonnalisation, déjà évoqués dans mon précédent article, ainsi que de l’outillage qui permet de les mettre en œuvre efficacement : la CDP (Customer Data Platform).

Cette approche répond à un besoin croissant d’offrir des interactions plus humaines, contextualisées, pertinentes et surtout en temps réel.

Mais les risques résident dans les limites de l’exercice. Il s’agit de trouver le bon équilibre entre personnalisation et respect de la vie privée, tout en maintenant une expérience cohérente sur l’ensemble des points de contact (la fameuse omnicanalité). Il faut également veiller à ce que les technologies utilisées pour garantir le temps réel (IA et Machine Learning) restent sous contrôle.

En conclusion, le B4Me est avant tout une posture stratégique où chaque consommateur est considéré comme unique. Il symbolise le passage de la segmentation de masse à l’individualisation systémique, rendue possible par des technologies intelligentes et une compréhension fine du parcours utilisateur.

Et bien d’autres…

On pourrait croiser ces concepts à l’infini pour inventer toujours de nouveaux types de portails, mais cela deviendrait vite lassant. Je me contenterai donc d’en citer quelques-uns supplémentaires :

  • S2B (Supplier to Business) : Les fournisseurs accompagnent activement des business indépendants (ex : Alibaba pour PME).
  • B2E (Business to Employee) : La fameuse Digital WorkpPlace
  • P2P (Peer to Peer) : Échanges ou services entre individus égaux, sans hiérarchie ni intermédiaire dominant (Cryptomonnaies)
  • B2A (Business to Administration / Gouvernement) : Entreprises qui fournissent des services aux administrations publiques (ex : Damart qui vend ses thermolactyl à des SDIS)
  • S2B (Startup to Business) : Une startup fournit des solutions innovantes à des entreprises établies.
  • H2H (Human to Human) : Dans le domaine du marketing, il s’agit de répondre aux besoins du client, tout en démontrant que l’on est humain et digne de confiance.

Alors que vient faire la DXP dans ce sujet ?

Maintenant que nous avons bien en tête cette frise chronologique et que les concepts sont clarifiés, une question demeure : que vient faire la DXP dans tout cela ?

Il existe une corrélation évidente entre l’usage et la satisfaction. Si vous êtes satisfait d’un site, vous y restez. Si l’expérience est pénible, vous partez. C’est pourquoi la gestion de la satisfaction utilisateur est cruciale pour favoriser la transformation (achat, don, inscription…).

C’est la raison pour laquelle on parle sans cesse de gestion de l’expérience utilisateur. Aujourd’hui, la meilleure manière d’y répondre repose sur deux piliers :

  • Une ergonomie irréprochable (maîtrisée par nos UX/UI designers),
  • et une personnalisation omnicanale.

En tant qu’utilisateur, je veux que l’on prenne soin de moi de manière personnalisée, sur tous mes points de contact avec la marque, et avec une cohérence parfaite. C’est précisément ce que permet la DXP, grâce à l’intégration de différents leviers :

  • Connaissance client pour la personnalisation → CDP
  • Diffusion cohérente de l’information sur tous les canaux → PIM
  • Expérience de navigation agréable et identité visuelle engageante → DAM & design UX/UI
  • Éditorialisation des contenus → CMS
  • Production rapide de nouveaux contenus et sites → Usine à sites
  • Catalogue fiable et localisable → PIM & interopérabilité avec le SI de l’entreprise
  • Tunnels d’achat fluides → outils e-commerce
  • Activation marketing efficace → outils d’activation

La DXP n’est pas un outil isolé : c’est un écosystème qui rend possible une expérience utilisateur cohérente, personnalisée et performante sur l’ensemble du parcours client. La DXP n’est pas qu’un outil, c’est le moteur d’une expérience client performante et mémorable.

  • Par Jérémy Peytevin

    Responsable Agence digitale

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